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Gynécologie & Sénologie

Publié le 15 mar 2019Lecture 4 min

Cancérologie mammaire : peut-on d’ores et déjà abandonner la pratique du curage axillaire ?

Emmanuel BARRANGER, Magali DEJODE, Yves FOUCHÉ, Yann DELPECH, Centre de lutte contre le cancer Antoine Lacassagne, Nice

La technique du ganglion sentinelle est une méthode fiable permettant une évaluation chirurgicale précise et sélective de l’aisselle. Depuis la publication de l’aCOSOg-Z0011, cette procédure tend à supplanter définitivement le curage axillaire.

La procédure du ganglion sentinelle a permis de réduire la morbidité de la chirurgie axillaire La technique du ganglion sentinelle (GS) a été introduite depuis un quart de siècle(1) initiant une désescalade chirurgicale du traitement du cancer du sein localisé. Après une phase de validation associée au curage axillaire (CA) afin de s’assurer de sa fiabilité, cette technique a permis de réduire significativement les indications de CA dont la morbidité est non négligeable. En cas de ganglion sentinelle métastasique, la réalisation d’un curage axillaire complémentaire n’apporte pas de bénéfice en survie. Après cette évoluions majeure dans la prise en charge axillaire en cas de cancer du sein T1-T2N0, le maintien du CA complémentaire en cas de GS métastasique semblait indiscutable puisque le risque de laisser un ou plusieurs ganglions métastasiques dans le reste de l’aisselle était considéré comme non négligeable, estimé à 40 % en cas de GS macro-métastasique et à 18 % en cas de micro-métastase. Pourtant, dès 2011, suite à la publicaion des résultats de l’essai ACOSOG Z-0011, le CA complémentaire a été remis en cause non seulement en cas de GS micro-métastasique, mais aussi en présence de macro-métastases(2). Giuliano et coll. ont en effet montré que l’absence de CA complémentaire en cas d’envahissement métastasique « limité » du GS n’avait pas d’impact négaif sur la survie ni sur le risque de récidive axillaire (RA). Cette étude randomisée a inclus seulement 891 patientes ayant un cancer du sein initialement classé N0 avec un envahissement macro ou micro-métastasique du GS. La survie globale et la survie sans récidive à 6,3 ans étaient comparables dans les 2 groupes. Il n’y avait pas plus de RA dans le groupe abstention que dans le groupe CA complémentaire (0,5 vs 0,9 % à 6,3 ans) qui d’ailleurs n’avait que 27 % d’envahissement ganglionnaire « non sentinelle ». Cet essai a fait l’objet de nombreuses critiques méthodologiques. En effet, le nombre de patientes incluses était inférieur de moitié à celui calculé comme nécessaire initialement (891 inclues et 856 évaluables sur 1 900 planifiées), et le groupe abstention était plus favorable que le groupe CA. En 2016, Giuliano et coll. ont confirmé avec un recul de 9,3 ans les résultats de la précédente publication(3). En effet, le taux de récidives ganglionnaires régionales (axillaire et claviculaire) était de 1,5 % après GS seul contre 0,5 % après CA complémentaire (non différent statistiquement). Une seule récidive axillaire est apparue dans le groupe abstention entre les deux publications. La survie globale et la survie sans récidive n’étaient toujours pas statistiquement différentes entre les deux groupes. Les auteurs ont conclu qu’après un suivi à long terme, la biopsie du GS seule permet un excellent contrôle locorégional comparable au CA complémentaire en cas de GS métastasique pour des patientes sélectionnées (critères ACOSOG : traitement conservateur du sein et radiothérapie du sein et traitement systémique [hormonothérapie ou chimiothérapie] et moins de 3 GS métastasiques). Cette actualisation à près de 10 ans lève la principale critique du recul insuffisant souligné par les défenseurs du CA. Les sociétés savantes étrangères ne recommandent plus le curage axillaire depuis 2013 Les premiers résultats de l’ACOSOG-Z0011 ont conduit les sociétés savantes américaine(4) et européenne(5) à actualiser leurs pratiques en ne recommandant plus de CA complémentaire en cas de GS métastasique lorsque les critères d’inclusion de l’essai ACOSOG-Z0011 étaient respectés, à savoir un traitement conservateur du sein, une radiothérapie de l’ensemble du sein, la prescription d’un traitement adjuvant (chimiothérapie et/ou hormonothérapie) et moins de 3 GS envahis quelle que soit la taille de la métastase. Les prochaines recommandations de Nice-Saint-Paul (2017) sont attendues avec impatience afin de poursuivre la désescalade chirurgicale axillaire, mais aussi réduire l’hétérogénéité des pratiques chirurgicales en France, comme démontré récemment par l’IRDES (Institut de recherche et de documentation en économie de la santé) à partir des données du PMSI, surtout selon le type d’établissement et le volume d’activité(6). Ainsi, en 2012, dans les centres hospitaliers, seulement 29 % des patientes bénéficiant d’une chirurgie conservatrice du sein pour cancer ont eu une procédure du GS, 58 % dans les centres hospitaliers régionaux, 35 % dans les établissements privés lucratifs, 32 % dans les établissements privés non lucratifs ; 100 % des femmes avaient accès à cette technique dans les centres de lutte contre le cancer (CLCC). Fort heureusement, cette différence de taux de pratique de la technique du GS s’est estompée en 2012. Il reste néanmoins une nette variabilité entre les CLCC et les centres hospitaliers régionaux, d’une part, et les autres types d’établissements, d’autre part. Cette variabilité était encore plus importante selon le volume d’activité des établissements. Ainsi, les structures effectuant plus de 110 chirurgies annuelles pour cancer du sein pratiquaient significativement davantage de procédure de GS (et donc moins de curage axillaire) que les structures de soins réalisant moins de 110 chirurgies du sein par an. "Publié dans Gynécologie Pratique"

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