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Dermatologie

Publié le 19 jan 2022Lecture 3 min

Existe-t-il un sur-risque de carcinome cutané sous anti-JAK ?

François CHASSET, hôpital Tenon, Paris

Éléments de réponse avec une cohorte rétrospective de maladie de Vaquez et myélofibrose traitée par ruxolitinib. 
 

Les inhibiteurs de JAK (JAKi) sont en plein essor dans le traitement de nombreuses pathologies, à la fois en hématologie dans la prise en charge de la maladie de Vaquez (MV), dans la myélofibrose (MF) ou dans la réaction du greffon contre l’hôte, mais également dans de nombreuses maladies inflammatoires comme la polyarthrite rhumatoïde, le rhumatisme psoriasique, le psoriasis, la dermatite atopique, les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin, la pelade, le lupus... avec de nombreuses AMM ou ATU récentes et des essais prometteurs. Le ruxolitinib est un inhibiteur de JAK1 et de JAK2, qui a l’AMM dans la myélofibrose depuis 2011 et la maladie de Vaquez depuis 2014 aux États-Unis. Dans l’essai de phase III CONFORT-II, qui évaluait la tolérance du ruxolitinib dans la myélofibrose, on notait la survenue de carcinomes cutanés dans 17 % du bras ruxolitinib versus 2 % dans le bras traitement classique, suggérant une augmentation du risque. Néanmoins, une augmentation des carcinomes cutanés est possible dans les syndromes myéloprolifératifs en association à la pathologie et surtout aux traitements cytoréducteurs. Il existe donc possiblement des biais de confusion aux essais ayant suggéré une augmentation du risque de cancers cutanés sous ruxolitinib. Afin de répondre à cette question, les auteurs ont réalisé une étude cas-témoins de patients avec une cohorte de MF ou de MV, et un suivi rétrospectif sur 10 ans. Les patients inclus avaient une MF ou une MV traitées pendant au moins 4 semaines au ruxolitinib et étaient appariés 2 : 1 avec des patients MF ou MV non traités par ruxolitinib sur l’âge, le sexe, l’ethnie, l’index de comorbidité de Charlson, la pathologie sous-jacente et la durée de suivi avec une utilisation d’un score de propension. Les carcinomes cutanés étaient diagnostiqués sur les données de l’anatomopathologie, et les carcinomes épidermoïdes in-situ étaient inclus dans l’analyse. Les analyses étaient réalisées par des analyses de survie avec un modèle de Cox. Au total, 564 patients ont été inclus : 188 exposés au ruxolitinib et 376 non exposés. Il n’y avait pas de différence en termes de phototype, d’exposition à la radiothérapie, de médicaments photosensibilisants et de statut mutationnel JAK2. Le taux d’incidence de cancer cutané était de 72 pour mille patients-années traités par ruxolitinib versus 33 dans le groupe non exposé au ruxolitinib. Après ajustement sur l’âge, le sexe, l’exposition à la chimiothérapie intra-veineuse et la prise d’hydroxyurée, il existait une augmentation significative de carcinomes cutanés sous ruxolitinib hazard ratio (HR) 2,69 (IC 95 % : 1,03-7,02) en particulier pour les carcinomes épidermoïdes HR 3,24 (IC 95 % : 1,45-7,22) mais pas pour les carcinomes basocellulaires HR 1,60 (IC 95 % : 0,37-7,01). Parmi les autres facteurs attachés à la survenue de carcinomes cutanés, l’immunosuppression était le facteur le plus associé à cette survenue HR 5,39 (IC 95 % : 1,34- 21,61). Les apparitions de carcinomes épidermoïdes étaient principalement localisées sur les zones photo-exposés. Un seul patient a présenté un carcinome épidermoïde avec atteinte ganglionnaire. Enfin, la survenue de carcinomes était significativement plus élevée chez les patients sans mutation JAK-2 HR 5,65 (1,70-18,75), p = 0,005. Au total, cette étude confirme les données suggérées par les essais cliniques en faveur d’une augmentation du risque de carcinomes cutanés sous ruxolitinib. Malgré le caractère rétrospectif, cette étude est bien construite sur le plan méthodologique et suggère très fortement un effet direct du ruxolitinib sur la survenue de carcinomes, en particulier de carcinomes épidermoïdes. Une surveillance des patients avec indication hématologique semble donc nécessaire. Il n’est pas possible d’extrapoler ces résultats aux maladies inflammatoires chroniques, mais cette étude invite à des études complémentaires dans ces indications.

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