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SFH 2023

Publié le 17 juin 2023Lecture 6 min

Néoplasies myéloprolifératives et scores pronostiques - Les utiliser en pratique clinique

D’après la communication de Lina Benajiba (Paris) – SFH, 29-31 mars 2023

L’intégration de facteurs de risque cliniques, biologiques et/ou moléculaires dans des modèles statistiques ou mathématiques a permis de développer un grand nombre de scores pronostiques utilisables dans le cadre de la prédiction et de l’évolutivité de néoplasies myéloprolifératives. Mais sont-ils vraiment utiles en pratique clinique ? Explications de Lina Benajiba (Paris).

« Nous essayons de prédire l’apparition et l’évolution de néoplasies myéloprolifératives, leurs complications, afin de mieux informer les patients et développer ainsi une prise en charge adaptée au risque de chacun d’entre eux. Un nombre important de scores pronostiques ont été développés. Il s’agit de savoir quels sont ceux qui sont les plus utiles aujourd’hui », a introduit Lina Benajiba (Paris).   Prédire la survie selon le sous-type de néoplasie myéloproliférative Selon les études, la survie médiane dans la polyglobulie de Vaquez (PV) est de 14 ans(1), d’une vingtaine d’années(2) dans la thrombocytopénie essentielle (TE), 17 ans dans la myélofibrose primitive(3) (MP) et plus de 14 ans dans la myélofibrose préfibrotique. Les différents facteurs décrits dans la littérature(1,4-10) associés au risque de décès sont : – cliniques : l’âge au diagnostic, les antécédents de thrombose dans le cadre de la PV et de la TE, la présence de splénomégalie dans la myélofibrose, le sexe masculin ; – biologiques : hyperleucocytose, présence d’une cytopénie ou de blastes circulants ; – moléculaires : des caryotypes défavorables et des mutations à haut risque moléculaire. Même s’ils sont peu utilisés en pratique clinique, deux scores pronostiques pour prédire la survie dans la PV et la TE existent : le WG MRT(1) dans la PV et l’IPSET dans la TE(5). Plus récemment des scores moléculaires ont été développés, le MIRSS-PV dans la PV et le MIPSS-ET dans la TE.(10) Les scores pronostiques de la myélofibrose sont basés sur la clinique avec l’IPSS(4), le DIPSS(11) permet d’évaluer le pronostic des patients à n’importe quel moment de leur maladie, le DIPSS-Plus(12) permet, quant à lui, d’incorporer aux caractéristiques cliniques et biologiques l’impact du caryotype de mauvais pronostique chez ces patients. Plus récemment, a été développé un score pronostique plus spécifique aux myélofibroses secondaires, le MYSEC-PM(13) comportant des facteurs cliniques et l’absence de mutation driver CALR comme marqueur moléculaire. L’AIPSS-MF (Artificial Intelligence Prognostic Scoring System for Myelofibrosis) est un score de risque individuel calculé grâce à un calculateur web pour pouvoir établir le score de chaque individu — développé sur une cohorte espagnole grâce à l’IA(3).   Intégration de facteurs moléculaires Des scores ont intégré en addition des facteurs cliniques et biologiques, des facteurs moléculaires (mutations de mauvais pronostiques) tels que le MIPSS70 et le MIPSS70+(14). Le MIPSS70+ v2.0(15) intègre la nouvelle classification de caryotype très défavorable et l’ajout de critères de sévérité de l’anémie qui vont être différents selon le sexe. Un score uniquement basé sur des critères moléculaires a été développé : le GIPSS qui permet, suivant l’analyse moléculaire et du caryotype, d’évaluer le pronostic des patients(16). Un score intégrant des facteurs cliniques, moléculaires et cytogénétiques, permet de calculer un risque individuel à la fois de survie et également de transformation en myélofibrose secondaire pour les PV et TE et de transformation en leucémie aiguë myéloïde pour l’ensemble des néoplasies myéloprolifératives(9). « Ce score est utile mais s’appuie sur un calculateur web, pas pratique à utiliser au quotidien », a indiqué Lina Benajiba. Les causes de décès de ces patients sont liées à la survenue d’événements thrombo-emboliques et/ou à la transformation de ces maladies en myélofibrose secondaire, leucémie aiguë myéloïde ou syndrome myélodysplasique. La prédiction des événements thrombo-emboliques sont cliniques (âge, antécédents de thrombose, facteurs de risque cardiovasculaires), biologiques (hyperleucocytose…), moléculaires (présence de mutation JAK2V617F)(1,17-23). Les scores pronostiques d’événements thrombotiques : score ELN(24) permet de stratifier les PV et TE à haut et à bas risque. Pour les thrombocytémies essentielles, la version révisée du score IPSET inclut l’âge, les antécédents de thrombose et la mutation oncogénique JAK2V617F sans inclure les facteurs cardiovasculaires(23). Les scores IPSET et IPSET révisé ont été récemment validés pour prédire l’apparition d’événements thrombotiques dans les myélofibroses préfibrotiques.   Limites des scores de prédiction des événements thrombo-emboliques(25) On distingue 2 éléments pouvant limiter la prédiction des événements thrombo-emboliques : – impact des mutations additionnelles ; – distinguer les thromboses artérielles des thromboses veineuses ; leurs physiopathologies sont distinctes et il semble important de pouvoir les séparer dans le cadre d’une stratification, ce que les différents scores pronostiques ne permettent pas aujourd’hui. Une cohorte de 1 000 patients de l’hôpital Saint-Louis présentant une PV, TE et MP ont bénéficié d’une analyse moléculaire ; parmi ces patients, 172 ont développé une thrombose artérielle et 208 une thrombose veineuse ; en analyse clinique multivariée, dans le cadre des thromboses artérielles, les facteurs de risque associés étaient l’âge > 60 ans, des facteurs de risque cardiovasculaires, la présence de risque de thrombose artérielle et également la présence de mutation TET2 ou DNMT3A ; pour les thromboses veineuses, les facteurs de risque associés étaient très différents : il s’agissait davantage d’antécédents de thromboses veineuses et la présence de mutation JAK2V617F avec une charge allélique > 50 %. À partir des facteurs de risque identifiés, l’équipe de Saint-Louis a développé dans un premier temps, un score artériel permettant de stratifier les patients à haut et bas risque d’événements thromboemboliques artériels ; comparativement aux scores ELN et IPSET, ce nouveau score avait de meilleures performances de prédiction d’événements thrombotiques artériels. De même, un score de risque veineux a été développé permettant de définir un groupe de patients à bas risque, à risque intermédiaire et à risque élevé. Cependant, la performance de l’ensemble des scores actuellement disponibles pour prédire le risque d’événements thromboemboliques veineux reste faible ; il est nécessaire d’identifier d’autres facteurs de risque pour les prendre en compte dans l’évaluation clinique.   Prédire la transformation en myélofibrose secondaire, en syndrome myélodysplasique et en leucémie aiguë myéloïde L’incidence de transformation en MF secondaire des PV et TE est de 1,2 % patients-années. Les facteurs de risque sont cliniques (l’âge au diagnostic, le sexe masculin, la splénomégalie), biologiques (l’hyperleucocytose, l’anémie, la thrombopénie) et moléculaires (facteurs caryotypiques, mutationnels). Le taux de transformation en LAM est de 2,4 % patients-années pour les patients atteints de MF primitive, de 0,5 % patient/années pour les PV, et 0,3 % patient/années pour les ET. Les facteurs de risque de transformation en syndrome myélodysplasique et en leucémie aiguë myéloïde sont l’âge élevé, l’exposition au pipobroman et au phosphore 32 (P32) ainsi que les cytopénies, la présence de blastes circulants, avec la présence de nombreuses mutations. Trois scores pronostiques permettent de prédire la transformation : le DIPSS-Plus permet de prédire la transformation en leucémie aiguë myéloïde(12) ainsi que le score Grinfield personnalisé(9) et le score AJPSS-MF(3). En pratique clinique, concernant la PV et la TE, on privilégiera les scores avec données clinico-moléculaires qui permettent de prédire les risque d’événements artériels et veineux. Dans le cadre de MF, on va s’intéresser aux scores pronostiques de survie de patients âgés de moins de 70 ans et de 70 ans ou plus (figure 1). Figure 1. Scores pronostiques dans la MF : survie. En conclusion, les données moléculaires améliorent les scores pronostiques qui sont importants pour les indications d’allogreffe mais également pour prédire les risques d’événements artériels et veineux. Les nouveaux défis pour demain est de mieux prédire les événements thrombotiques veineux, valider des scores moléculaires pour les myélofibroses secondaires. Pour Lina Benajiba, « se pose la question de la validité de ces scores dans l’ère des iJAK et de la prédiction de la réponse aux traitements ».   Sylvie LE GAC, Paris

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