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Gynécologie & Sénologie

Publié le 10 oct 2023Lecture 5 min

Réalité augmentée et IA en question dans le cancer de l’endomètre

Sylvie LE GAC - D’après la communication de Lise Lecointre (CHU Hautepierre, Strasbourg)

Pour permettre une identification plus fiable et reproductible du GS, un système de navigation en réalité augmentée basé sur un recalage intrinsèque et sur l’utilisation d’un bras collaboratif robotique a été développé permettant la localisation spatiale du GS en temps réel et en continu.
Afin d’optimiser les performances diagnostiques de l’IRM préopératoire, un modèle prédictif d’intelligence artificielle (IA) en imagerie a été développé dont les résultats préliminaires confirment son aide stratégique en oncologie.

« La réalité augmentée et l’intelligence artificielle offrent des perspectives prometteuses dans le cancer de l’endomètre pour sa détection précoce, son diagnostic précis et la personnalisation des traitements, ouvrant ainsi de nouvelles voies vers l’amélioration des résultats cliniques et de la qualité de vie des patientes ». Une phrase issue de Chat GPT reprise par Lise Lecointre (CHU Hautepierre, Strasbourg). Les données épidémiologiques mondiales classent le cancer de l’utérus au 6e rang des cancers les plus fréquents : 417 367 nouveaux cas et 97 370 décès en 2020(1). Le plus souvent ce sont des patientes en postménopause avec comorbidités. L’âge moyen du diagnostic est 68 ans(2), 65 % avec obésité concomitante(3,4). « Dans 80 % des cas, ce sont des stades FIGO I, stades précoces accessibles à une chirurgie, ce qui est très intéressant pour définir un modèle de réalité augmentée », a indiqué Lise Lecointre (CHU Hautepierre, Strasbourg). Le traitement de ces stades repose sur une chirurgie mini-invasive avec l’exérèse de la tumeur primitive et la biopsie du ganglion sentinelle (GS) pelvien(5), « cette démarche s’inscrit dans un concept de désescalade thérapeutique, pour obtenir l’ensemble des informations pronostiques (stratification ganglionnaire) afin de définir une prise en charge adaptée et ainsi ne pas surtraiter les patientes sans métastases et a contrario ne pas sous-estimer l’envahissement métastatique », a précisé Lise Lecointre. La problématique de cette pathologie réside, d’une part, dans une évaluation radiologique préopératoire imprécise et, d’autre part, dans des difficultés de détection du GS en peropératoire dues aux limites des techniques de détection standards. La réalité augmentée est une approche qui permet d’ajouter des informations virtuelles (imagerie préopératoire) à l’image cœlioscopique obtenue en temps réel. « La réalité augmentée en chirurgie laparoscopique permet une surperposition à la vision endoscopique d’images de structures anatomiques identifiées sur l’imagerie préopératoire en temps réel. » Les applications en chirurgie gynécologique sont une meilleure visualisation des fibromes, de la cavité et de la vascularisation utérine, une meilleure localisation de l’uretère distal et son applicabilité à d’autres chirurgies complexes. Pour permettre une identification plus fiable et reproductible du GS, un système expérimental de guidage opératoire par réalité augmentée basé sur un recalage extrinsèque et sur l’utilisation d’un bras collaboratif robotique a été développé, permettant la localisation spatiale du GS pelvien en temps réel et en continu. Une étude préclinique a été menée pour valider le prototypage expérimental, la technique et l’exploitation des données. Une enquête auprès des chirurgiens a permis de mettre en évidence le bénéfice clinique avec une amélioration significative de la vision des structures avec l’assistance de la réalité augmentée par rapport à la vision directe. C’est le premier système d’assistance robotique basé sur la réalité augmentée s’appuyant sur la fusion multimodale en temps réel et en continu. Les résultats sont prometteurs en termes de précision et d’ergonomie du dispositif. Toutefois, Lise Lecointre a pointé les points négatifs de ce premier système : nécessité d’un imageur peropératoire non disponible dans tous les blocs opératoires, système dépendant du mouvement/déplacement accidentel du sujet au cours de l’intervention, une mire bimodale, les difficultés techniques/recalage liées à la position de Trendelenburg. Pour surseoir à toutes ces premières difficultés mises en évidence dans le premier prototype, un autre système de navigation basé sur un recalage intrinsèque cette fois a été conçu pour l’identification du ganglion sentinelle pelvien(6). Le dépôt d’un brevet potentiellement implantable dans un robot chirurgical commercialisé est en cours.   Synergie réalité augmentée et intelligence artificielle   « L’intelligence artificielle est extrêmement complémentaire à la réalité augmentée, a affirmé L. Lecointre. L’atout de l’IA en cancérologie est l’évaluation automatique de la caractérisation tumorale. L’essor de l’IA est lié à l’explosion des données. » Comment améliorer la précision diagnostic (histologie, stadification…) en préopératoire ? La radiomique est une discipline récente d’application de l’intelligence artificielle (IA) en radiologie permettant la segmentation des images radiologiques. Il s’agit d’une extraction à haut débit de données d’imagerie médicale (IRM) permettant l’obtention d’informations prédictives et/ou pronostiques. « En oncologie, a souligné Lise Lecointre, la radiomique est une aide à la prise de décision clinique dans un but de soins personnalisés. Il s’agit de compléter l’évaluation préopératoire de manière non invasive et préciser ainsi le stade de la maladie (valeur pronostique). L’objectif est une meilleure sélection des patientes et une réduction de la morbi-mortalité. La finalité de l’IA à terme dans le cancer de l’endomètre sera d’aider à différencier les stades IA sans ou avec envahissement endométrial », a-t-elle souligné. La radiomique doit s’appuyer sur des protocoles standardisés pour assurer la reproductibilité et la crédibilité des systèmes en cours de développement. Lise Lecointre a réalisé une revue systématique de la littérature actuelle concernant la radiomique : la performance de 17 articles a été étudiée en prenant en compte leur impact clinique (l’invasion myométriale profonde, l’invasion de l’espace lympho-vasculaire, l’atteinte ganglionnaire, etc.), le protocole d’acquisition des données, le modèle de machine learning ou de deep learning et la qualité de l’analyse statistique. « Pour permettre une lecture plus facile à l’avenir des études d’IA dans le cancer de l’endomètre, a expliqué L. Lecointre, nous avons créé un nouveau score de qualité de l’IA simplifié et reproductible (SRQS) basé sur 10 paramètres radiologiques allant de 0 à 20 points. Le seuil SRQS a été défini à 10/20 pour définir une étude de pertinence clinique satisfaisante. Finalement, nous n’avons retenu que 7 articles de grande qualité ayant un impact clinique. SRQS était hautement reproductible (Kappa = 0,95 ; IC95% [0,907-0,988]). »(7) Les données préliminaires sont extrêmement prometteuses. Les perspectives sont de développer des systèmes en pratique courante chez l’humain. « Si nous pouvions intégrer nos données d’imagerie en lien avec les biomarqueurs moléculaires, ce serait une réelle avancée pour définir la stratégie de prise en charge de ces patientes », a conclu Lise Lecointre.

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