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Onco-hémato

Publié le 17 avr 2024Lecture 3 min

SFH 2024 | Traitements des syndromes myéloprolifératifs : quelles toxicités cutanées redouter ?

Suzette VINALET, Paris

Dans les syndromes myéloprolifératifs (SMP), les effets secondaires dermatologiques des thérapies utilisées ont un retentissement majeur sur la qualité de vie, l’observance et le pronostic vital. Mais quels sont-ils exactement ?

Trois traitements des SMP sont principalement pourvoyeurs de toxicités cutanées : l’hydroxyurée (HU), les interférons (IFN) et les inhibiteurs de Janus kinase (anti-JAK) comme le ruxolutinib (ruxo).   Ulcères et carcinomes sous hydroxyurée  L’HU peut être à l’origine d’ulcérations (71 % des cas) et de lésions précancéreuses — kératoses actiniques (KA) et dysplasies squameuses (DS) — pouvant évoluer vers des carcinomes cutanés (CC) basocellulaires (CBC), épidermoïdes (CEC) ou de Merkel (figure 1). Ces effets cutanés ont une incidence de 5 à 12 pour 100 patients-années, augmentent avec la dose et le temps, et nécessitent un arrêt de traitement dans 20 % des cas. Figure 1. ©SFH 2024 Les ulcères cutanés surviennent à la dose de 1 à 1,5 g/jour et évoquent des vasculites livédoïdes. « La macrocytose en lien avec le traitement et la décroissance des cellules endothéliales réduirait le flot circulant sanguin, et amènerait une hypoxie puis une ulcération », précise le Dr Émilien Ezine (Paris). Plus fréquentes chez les femmes, les plaies sont périmaléollaires, post-traumatiques, parfois nécrotiques, avec une peau périlésionnelle érythémateuse et violacée (figure 2). Intense et rebelle, la douleur peut nécessiter le recours aux opioïdes et être soulagée par l’électrostimulation (TENS), qui améliore aussi la vitesse de cicatrisation (souvent très lente). La prise en charge passe par des soins de la peau périlésionnelle, la compression, voire une greffe autologue. Une biopsie s’impose en cas de berges bourgeonnantes, avec saignements au contact. Figure 2. ©SFH 2024 Les KA sont des petites lésions érythémateuses, squameuses, réparties sur les zones photo-exposées. Leur fréquence sous HU s’élève à 10 % et l’évolution vers des CC concernent 4 % des cas, avec une latence de 2 à 13 ans (6,5 ans en moyenne). Quant à la DS (ressemblant à une pseudo-dermatomyosite), il s’agit de plaques confluentes photo-distribuées érythémateuses associées à une xérose étendue. Avant traitement, la prise en charge de ces lésions précancéreuses passe par l’information des patients, le repérage des cas à risque et des conseils de photoprotection. Pendant le traitement, un examen de la peau est à réaliser à chaque contrôle, et une biopsie en cas de lésion atypique. En présence de CC, l’arrêt de l’HU n’est pas systématique mais à discuter en cas de formes localement avancées à haut risque de récidive. Une chimioprophylaxie peut être envisagée et une intervention chirurgicale parfois nécessaire.   Interféron alpha : gare aux dermatoses inflammatoires Sous IFN, peu d’effets cutanés nécessitent l’arrêt du traitement (sauf éruptions granulomateuses). Mais l’IFN-α peut provoquer ou aggraver des dermatoses ou maladies inflammatoires (eczéma, psoriasis, sarcoïdose), des troubles des phanères (alopécie), des prurits, des xéroses… Il est recommandé d’utiliser des nettoyants sans savon, de réaliser des bains tièdes avec de l’amidon afin de calmer les démangeaisons, et d’éviter les dermocorticoïdes en cas de prurit.   Et avec le ruxolitinib ? « Une surreprésentation des infections virales est observée sous ruxolitinib », constate le Dr Ezine. Le risque de zona est deux à sept fois plus élevé : 5,4 pour 100 patients années à 80 semaines(1). Chez les patients à haut risque, la vaccination est à discuter. Les CEC et CBC sont plus agressifs et fréquents : 17,1 % sous ruxo versus 2,7 % sous autre traitement(2). En moyenne, le délai d'apparition des cancers cutanés est de 2,5 ans et la dose de 15 mg (figure 3). Figure 3. ©SFH 2024 Dans les maladies inflammatoires chroniques(3), les anti-JAK sont associés à un sur-risque de tumeur maligne par rapport aux anti-TNF (non observé versus placebo ou méthotrexate). Dans la myélofibrose et la polyglobulie de Vaquez, une étude rétrospective menée pendant 10 ans sur 564 patients (188 sous ruxo et 376 non exposés) a rapporté 72 CC sous ruxo (versus 33) pour 1 000 patients-années, soit une augmentation du risque de 2,69(4). Face à ces toxicités cutanées, il convient ainsi de déceler et traiter les formes précancéreuses et les CC in situ (chirurgie, cryothérapie, 5-FU topique, photothérapie dynamique), de documenter les cancers invasifs (biopsie) et de traquer leur agressivité. Le spectre des complications est très polymorphe, avec des lésions inflammatoires toxiques. « Des études épidémiogénétiques et fonctionnelles ex vivo sont nécessaires, pour faire la part du terrain génétique, de l’immunosuppression et de l'action propre des traitements », conclut le Dr Ezine.

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